Des facteurs cognitifs (internes et externes) et des facteurs affectifs influencent la prédiction d’un citoyen sur l’issue d’une campagne électorale. Respectivement, les analyses graphiques et statistiques ci-haut suggèrent que la sophistication politique, l’information accessible, l’identification partisane et l’intérêt pour la politique ont un effet sur la formulation de ces prédictions.

Plus précisément, l’identification partisane semble isolément avoir un effet : l’identification d’un répondant à un parti le pousse à formuler une prédiction plus optimiste qui se manifeste de deux façons, soit par une surestimation des chances de victoire de son parti préféré ou par une sous-estimation des chances de ses adversaires.

Cette différence entre la prédiction des partisans et des autres répondants s’amenuise toutefois avec une plus forte sophistication politique. Même si la vigueur de cette interaction entre ces deux facteurs ne s’observe pas dans tous les cas, elle suggère que l’hypothèse nulle devrait être rejetée et qu’une plus grande sophistication politique tend à ramener la prédiction plus près du véritable résultat de la course. Cet effet est plus aisément observable pour les partis qui ont obtenu les moins bons résultats, notamment parce que la surestimation était plus considérable. C’est aussi le cas pour les élections de 2008 et de 2011, ce qui peut être dû au caractère particulier de ces campagnes ou par la formulation de la prédiction dans le cadre de l’ÉÉC.

D’un point de vue « externe », l’information disponible au répondant est de deux natures : les sondages publiés au cours de la campagne (pour la course nationale) et l’issue de la dernière course locale. L’effet des sondages semble être de favoriser le parti qui mène dans le sondage le plus récent, ce qui est accentué par un plus grand intérêt du répondant pour la politique. Cependant, cette hypothèse n’est vérifiable que lorsque le résultat des sondages (le parti qui mène ou les intentions de vote exprimées) change au cours d’une campagne, ce qui nécessite pour l’électeur assez d’intérêt pour se tenir au courant des dernières tendances. Les campagnes de 2008 et de 2011, marquées par une avance continue du Parti conservateur, ne nous permettent donc pas de tirer des conclusions très probantes à ce sujet.

L’interaction la plus notable est celle entre le vainqueur local de la dernière élection et l’intérêt d’un répondant pour la politique. En effet, l’intérêt d’un répondant n’influence la prédiction à la hausse que si le parti en question a remporté la dernière élection locale. Même s’il s’agit d’une information extrêmement rudimentaire, elle permet de supporter un lien entre un certain intérêt (si minime soit-il) et l’assimilation de l’information disponible au sujet du paysage électoral.

* * *

Prochain chapitre : Discussion